Longtemps je pensais que le portrait était un genre à éviter. Surtout pour un écrivain, qu’on ne devait pas rencontrer parce que tout était dit dans l’œuvre. C’était dans l’esprit de l’époque. J’avais tort, bien sûr, mais j’ai mis du temps à m’en convaincre. Il fallait que les contraintes du métier m’y obligent. J’ai bientôt découvert la richesse de cet exercice dont je n’ai cessé depuis de goûter les charmes.Je me souviens encore de mes premières « visites au grand écrivain », intimidée, presque effrayée : de mon intrusion entre l’auteur et son œuvre ; de la crainte d’être déçue par le décalage entre la prose et la parole ; ou de ne pas réussir à restituer la singularité de ces rencontres. Les doutes se sont dissipés, j’y ai vite pris goût.Voici une promenade, toute personnelle, dans mes exercices d’admiration. Ils ne portent pas uniquement sur des écrivains, mais aussi sur des éditeurs, des comédiens, des hommes de cultureà Au fil des pages et d’un portrait à l’autre se dessine ainsi tout un paysage qui commence à s’éloigner, je m’en rends compte aujourd’hui, un monde d’hier mais qui reste vivant parce qu’il continue à nous parler de ce que nous sommes toujours. (Jo. S.)Journaliste et écrivaine, Josyane Savigneau est née en 1951. Entrée au journal Le Monde en 1977, elle est responsable du supplément Le Monde des Livres de 1991 à 2005. Elle est l’auteur de plusieurs livres, dont les biographies de Carson McCullers et de Marguerite Yourcenar : Marguerite Yourcenar. L’invention d’une vie (NRF Biographies, 1990, Folio n° 2495). Elle est membre du jury du prix Femina depuis 2014.