Avec Gold Shadow, Asaf Avidan signe son 6ème album en 8 ans et conclut de la plus belle des manières un cycle de vie particulièrement dense, fait d’échecs (amoureux) et d’éclatants succès (artistiques). À 34 ans, ce fils de diplomate, né à Jérusalem et grandi entre la Jamaïque, la Thaïlande et Israël, nous gratifie d’un disque rare qui tranche de façon spectaculaire avec la ronde des « marchandises culturelles » par la pureté cash des émotions qu’il véhicule et la riche diversité des matériaux musicaux qu’il convoque : blues, jazz, rock, folk et synth pop... « C’est l’album où j’ai mis le plus de moi-même » admet le chanteur à la crête punk. « Vocalement, je m’y suis plus investi que dans n’importe quel autre de mes projets. Quant aux textes, je les ai travaillés avec encore plus d’ambition qu’auparavant. » L’aveu a quelque chose de superflu. Comme si les 12 chansons de Gold Shadow vous marquaient suffisamment pour se dispenser d’en faire la retape. Elles vous marquent comme vos premières cigarettes. Ou mieux, comme ces brûlures de cigarettes à même la peau que l’on s’inflige enfant pour prouver à ses camarades que l’on est capable de surmonter la douleur. Au début, on ne sent qu’un léger picotement. Et à la fin, on est près de considérer la souffrance comme une extension du plaisir. C’est un processus sensoriel identique à l’œuvre dans les plus beaux chants d’Edith Piaf, Nina Simone ou Billy Holiday. Ceux dont Deleuze aurait pu dire: « il y a de la mort, de la tristesse, de la maladie en eux. Mais de cette mort, de cette souffrance, de cette maladie, s’élève une même clameur de l’être ».