Christophe Dejours propose depuis longtemps une approche différente du travail, qui sintéresse à la souffrance qui sy joue et aux stratégies que les gens construisent pour sen protéger. Il soppose aux partisans de la fin du travail et sinquiète au contraire de sa disparition au profit de la gestion. Longtemps minoritaire, sa démarche est apparue seule à pouvoir donner une lecture rationnelle des suicides qui ont frappé le monde du travail ces dernières années. Après avoir commencé ses enquêtes dans le monde ouvrier, il a bientôt vu les cadres et les patrons eux-mêmes lui demander de réfléchir avec eux à une organisation du travail qui les mettrait à labri de ces passages à lacte. Cest ce constat qui motive ce livre dentretien : nous sommes dans un moment charnière, dextrême domination dun côté, imposée par les méthodes gestionnaires comme lévaluation individuelle des performances qui a détruit toute solidarité et a plongé les travailleurs dans une solitude terrible ; mais un moment de résistance aussi, oáu les réalisateurs, les romanciers, les metteurs en scène, les journalistes donnent de plus en plus à voir les dégâts des organisations du travail héritées des années 80, où les avocats gagnent des procès contre de puissantes entreprises, où lensemble des salariés doutent de lefficacité dun modèle qui les détruit au quotidien. Au-delà de cet état des lieux, Christophe Dejours voudrait en reconstruire l'histoire afin de montrer la centralité du travail et la manière dont nous pouvons tous ensemble le réformer aujourdhui. Avec une certitude : le système ne fonctionne que grâce à notre consentement et notre zèle, nous pouvons le mettre en panne et en construire un tout autre.